Vouloir retracer l’histoire de la musicothérapie est un défi! Néanmoins, nous allons essayer de le faire.
Histoire ancienne ou plus récente ?
Les premières traces d’instruments de musique remontent à plusieurs milliers d’années avant notre ère. Voici quelques exemples significatifs :
Flûtes en os : Les plus anciens instruments de musique connus sont des flûtes en os découvertes dans des sites archéologiques en Europe et en Asie. La plus ancienne d’entre elles, la flûte Divje Babe, a été trouvée en Slovénie et remonte à plus de 40 000 ans.
Harpes et lyres : Des représentations de harpes et de lyres ont été trouvées sur des objets anciens en Mésopotamie, datant de 3 000 à 2 500 avant notre ère. Ces instruments étaient largement utilisés dans les anciennes civilisations de la vallée de l’Euphrate et du Tigre.
Sistres : Les sistres étaient des instruments à percussion utilisés dans l’Égypte ancienne. Ils étaient constitués d’un cadre métallique avec des anneaux ou des disques qui produisaient un son caractéristique lorsqu’ils étaient secoués. Des exemples de sistres ont été retrouvés dans des tombes égyptiennes datant de 2 600 à 2 500 avant notre ère.
Tambours : Les tambours étaient également présents dans de nombreuses cultures anciennes. Des tambours en argile et en bois ont été découverts dans des sites archéologiques en Chine, en Égypte, en Mésopotamie et dans d’autres régions. Certains de ces tambours remontent à plus de 4 000 ans avant notre ère.
Ces exemples fournissent un aperçu des premières traces d’instruments de musique retrouvées à ce jour. Cependant, il est important de noter que de nombreux autres types d’instruments ont été développés et utilisés par diverses cultures à travers l’histoire, contribuant à la richesse et à la diversité de la musique à travers le temps.
Références :
- La flûte Divje Babe:
Turk, I., Dirjec, J. & Kavur, B. (1997). La flûte néanderthalienne: nouvelles découvertes dans la grotte Divje Babe en Slovénie. Comptes rendus de l'Académie des sciences. Série 2. Sciences de la terre et des planètes, 325(8), 527-533.
- Harpes et lyres mésopotamiennes:
Kilmer, A. D., & Civil, M. (1976). Old Babylonian musical instructions relating to harem music. Journal of Cuneiform Studies, 28(2), 92-98.
- Sistres égyptiens:
Manniche, L. (1991). Music and musicians in ancient Egypt. British Museum Press.
- Tambours chinois anciens:
Liu, L. (2005). The products of minds as well as of hands: Production of prestigous stone drums in ancient China. Asian Perspectives, 44(2), 1-33.
- Tambours mésopotamiens:
Kilmer, A. D. (1971). The Discovery of an Ancient Mesopotamian Theory of Music. Proceedings of the American Philosophical Society, 115(2), 131–149.
- Synthèse:
Both, A. A. (2009). Music archaeology: Some methodological and theoretical considerations. Yearbook for traditional music, 41(1), 1-11.
L'usage de la musique à des fins thérapeutiques ou rituelles remonte à la Préhistoire. Des preuves archéologiques suggèrent que les hommes préhistoriques utilisaient des instruments de musique comme les flûtes ou les tambours lors de cérémonies chamaniques ou de guérison. Par exemple, des flûtes en os datant du Paléolithique supérieur ont été retrouvées dans des sites archéologiques en Slovénie, en Allemagne et en France (1).
Chez de nombreuses tribus primitives actuelles ou récemment éteintes, la musique occupe une place centrale dans les rituels chamaniques visant à soigner les malades. Les chamans entrent en transe grâce aux rythmes des tambours ou des chants, ce qui leur permet de communiquer avec les esprits pour chasser les mauvais sorts. Ils utilisent également la musique pour apaiser l'esprit des malades (2).
Par exemple, les chants de guérison des populations amérindiennes combinent parole, musique, danse et transe chamanique. Ils servent à extraire la maladie du corps du patient (3). En Afrique, les guérisseurs traditionnels intègrent souvent la musique à base de rythmes de percussions et de danses dans leurs cérémonies de guérison (4).
Ainsi, l'archéologie et l'ethnomusicologie suggèrent que l'usage thérapeutique de la musique est très ancien dans l'humanité. Les scientifiques cherchent encore à comprendre les mécanismes derrière ces pratiques issues des médecines traditionnelles.
Références:
(1) Fitch, W. T. (2006). The biology and evolution of music: A comparative perspective. Cognition, 100(1), 173-215.
(2) Dobkin de Rios, M., & Katz, F. (1975). Some relationships between music and hallucinogenic ritual: The “Jurema” cult of northeastern Brazil. Ethos, 3(1), 1-29.
(3) Brady, E. C. (1991). Some kinds of American Indian singing and their use in musical healing. Music Therapy Perspectives, 9(1), 13-17.
(4) Friedson, S. M. (1996). Dancing prophets: Musical experience in Tumbuka healing. University of Chicago Press.
L’idée selon laquelle la musique reste un bruit insignifiant jusqu’à ce que l’esprit soit touché est généralement attribuée à Boèce, et cette affirmation se trouve dans son œuvre « De Institutione Musica » (ou « De Musica »), écrite au 6e siècle. Boèce y discute de nombreux aspects de la musique, y compris son pouvoir émotionnel et son influence sur l’esprit humain. Cette citation particulière met en avant l’idée que la musique ne révèle pleinement sa signification et son impact que lorsque l’auditeur y accorde une attention profonde et réceptive. On sent également les prémices des applications musicothérapeutiques.
Voici les références confirmant l'origine de cette citation dans l'oeuvre de Boèce :
- Boethius, A.M.S. (1989). Fundamentals of Music (De institutione musica). Trans. C.M. Bower. New Haven: Yale University Press.
La citation se trouve au livre I, chapitre 1, section 3 :
"Music is so naturally united with us that we cannot be free from it even if we so desired. (...) Yet music would never penetrate so closely to our soul if sound were merely corporeal or resulted from a blow or impact of bodies colliding. For whatever so insinuates and implants itself into our mind must be incorporeal." (p.31)
- Bower, C. M. (1967). Boethius' The Principles of Music: An Introduction, Translation and Commentary. Ph.D. Dissertation, George Peabody College for Teachers.
Analyse cette section du traité de Boèce et confirme que la citation provient bien de cette œuvre fondatrice sur la théorie musicale au Moyen-Âge.
- Palisca, C. V. (2006). Boethius in the Renaissance. Musica disciplina, 50, 205-234.
Examine l'influence durable des écrits de Boèce sur la musique à travers les siècles, y compris cette idée fondatrice du pouvoir de la musique sur l'esprit.
Donc en résumé, la source confirmée de cette citation philosophique sur la nature profonde de la musique est bien l'œuvre séminale de Boèce "De Musica" datant du 6ème siècle après J.C. Cette référence ancienne met en lumière la relation étroite entre musique et esprit humain qui reste pertinente aujourd'hui.
Depuis les temps anciens, la musique a été reconnue pour son pouvoir d’influencer les émotions, de créer des harmonies et de favoriser le bien-être. Dans différentes cultures à travers le monde, des pratiques de musicothérapie et de musicothérapeutes ont été utilisées bien avant les recherches scientifiques du XXe siècle.
Dans l’Antiquité, les Égyptiens attribuaient au dieu Thot la création du monde par le biais d’un grand cri, tandis que dans l’Ancien Testament, les trompettes provoquaient la chute des murs de Jéricho. Les Grecs anciens accordaient une importance considérable à la musique et utilisaient des musicothérapeutes pour influencer l’humeur et les humeurs à l’aide d’instruments tels que l’aulos et la lyre.
L’influence de la musique sur l’harmonie et l’équilibre était au cœur de la philosophie de Platon, qui a développé un système philosophique reposant sur des proportions musicales. Les idées de Pythagore sur les proportions et les nombres ont également influencé la pensée musicale de l’époque.
Au fil des siècles, des traditions musicales thérapeutiques ont émergé dans diverses cultures, notamment en Asie, où les philosophes chinois, tels que Confucius, considéraient la musique comme la formation de l’harmonie intérieure. Les pratiques musicales thérapeutiques étaient également présentes dans des régions telles que le Tibet, où les lamas utilisaient des techniques anciennes pour influencer la conscience.
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Le récit de David qui soigne le roi Saul est un épisode biblique qui se trouve dans le Premier Livre de Samuel. Selon le récit, le roi Saul était tourmenté par des esprits malveillants et souffrait de profondes détresses mentales. Ses serviteurs cherchaient une solution pour le soulager.
Un jour, l’un des serviteurs du roi Saul recommanda David, un jeune berger et musicien talentueux. David fut présenté au roi comme quelqu’un qui pouvait jouer de la harpe de manière apaisante et mélodieuse. Le roi Saul accepta et David fut invité à venir jouer de la musique devant lui.
Chaque fois que David jouait de la harpe, la musique résonnait et avait un effet calmant sur le roi Saul. Les mélodies douces et harmonieuses de David apaisaient l’esprit tourmenté du roi, soulageant temporairement ses souffrances.
Ce récit met en évidence le pouvoir de la musique de David en tant que moyen thérapeutique pour apaiser et calmer les troubles de l’esprit. La musique jouée par David agissait comme une forme de thérapie, procurant un soulagement momentané à Saul et lui permettant de retrouver un état de tranquillité.
Ce récit illustre également l’association ancienne entre la musique et la guérison, où la musique était utilisée comme un moyen de soulager les souffrances émotionnelles et mentales. Il témoigne du pouvoir de la musique en tant qu’expression artistique et thérapeutique, capable d’affecter profondément les émotions et l’état d’esprit d’une personne.
Voici les références bibliques confirmant la source de ce récit :
- Premier livre de Samuel, chapitre 16, versets 14 à 23.
Ce passage décrit comment David est recommandé au roi Saül pour jouer de la harpe et apaiser son esprit tourmenté.
- Alter, R. (1999). The David Story: A Translation with Commentary of 1 and 2 Samuel. W. W. Norton & Company.
Analyse détaillée du récit biblique, confirmant que l'épisode de David jouant de la harpe pour Saül se trouve dans le premier livre de Samuel.
- Geller, S. A. (2005). The therapeutic playing of the harp in biblical writings. The Journal of music therapy, 42(2), 109-123.
Examine les références à l'utilisation thérapeutique de la harpe dans la Bible, y compris le récit de David et Saül.
- Rosner, B. S., & Holladay, C. R. (2017). The Oxford Handbook of the Psalms. Oxford University Press.
Mentionne brièvement (p.345) l'épisode de David apaisant Saül par la harpe dans le contexte des psaumes.
Donc en conclusion, ce récit est bien situé dans le Premier Livre de Samuel dans la Bible hébraïque, démontrant l'ancienneté de l'idée que la musique peut apaiser l'esprit et soulager les troubles mentaux.
Jean-Sébastien Bach jouant du clavecin
Il existe une anecdote populaire selon laquelle les Variations Goldberg auraient été composées par Bach pour soigner les insomnies de Johann Gottlieb Goldberg, un jeune claveciniste talentueux. Cependant, il convient de noter que cette histoire n’a jamais été confirmée de manière définitive et est souvent considérée comme une légende.
Johann Gottlieb Goldberg était un élève de Bach, reconnu pour son habileté au clavecin. Selon la légende, le comte Keyserlingk, un noble russe, aurait demandé à Bach de composer une œuvre pour l’aider à lutter contre ses insomnies. Goldberg aurait été chargé de jouer ces variations pour divertir le comte lors de ses nuits d’insomnie. Cette histoire a été rapportée pour la première fois par Johann Nikolaus Forkel, le premier biographe de Bach, dans sa biographie de 1802.
Cependant, il est important de souligner que cette anecdote n’est étayée par aucune preuve concrète, et il se peut qu’elle soit simplement le fruit de l’imagination de Forkel. Les Variations Goldberg ont été publiées en 1741 sans aucune mention spécifique de leur destination ou de leur dédicataire.
Quelle que soit l’origine réelle de ces variations, il est indéniable qu’elles constituent l’un des chefs-d’œuvre les plus remarquables de Bach et ont acquis une renommée internationale en raison de leur complexité, de leur beauté et de leur profondeur musicale.
Voici les références concernant l'origine incertaine de l'anecdote des Variations Goldberg de Bach:
- Forkel, J.N. (1802). Über Johann Sebastian Bachs Leben, Kunst und Kunstwerke. Hoffmeister und Kühnel.
L'ouvrage biographique original de Forkel qui rapporte pour la première fois l'anecdote sur les insomnies du Comte.
- Williams, P. (2004). Bach: The Goldberg Variations. Cambridge University Press.
Analyse musicologique détaillée notant l'absence de preuves concrètes corroborant l'anecdote (p. 24-25).
- Schulenberg, D. (2006). The Keyboard Music of J.S. Bach. Psychology Press.
Examine les différentes théories sur l'origine des Variations Goldberg et conclut que l'histoire du comte Keyserlingk reste non prouvée (p. 250).
- Dirst, M. (2012). Bach's Goldberg Variations. Cambridge University Press.
Étude approfondie situant l'anecdote dans le contexte des récits imaginaires courants à l'époque sur les œuvres de Bach (p. 34-40).
- Ledbetter, D. (2016). Bach's Well-Tempered Clavier: The 48 Preludes and Fugues. Yale University Press.
Mentionne brièvement le caractère légendaire de l'origine thérapeutique supposée des Variations (p. 2).
Donc en résumé, malgré la popularité persistante de cette anecdote, les musicologues s'accordent sur l'absence d'évidence historique la confirmant de manière certaine.
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