L'antimamère

Le boomer et sa mère

Girouette

Girouette

Girouette

Ah, la chanson "Ma petite girouette" de Georges Chelon, cette douce mélodie qui tournait en boucle dans mon enfance, et qui, aujourd'hui, s'avère être une prophétie redoutablement précise sur l'état mental de ma mère. Ah, si Chelon savait qu'il écrivait la bande-son de mon cauchemar quotidien…

Ma chère maman, autrefois aussi prévisible qu'un métronome bien huilé, a depuis plus de 12 mois adopté la philosophie de la girouette. Un souffle de vent, une brise d'idée saugrenue, et hop ! Voilà qu'elle décide de bâtir une maison en bordure de son terrain, projet qu'elle change, modifie, puis abandonne, pour mieux y revenir. Jusqu'à ce que déconfiture s'en suive ! Et moi, pauvre hère, je tentais de suivre ce ballet frénétique, à bout de souffle et de patience.

"Je vends ma maison, ou peut-être pas. Je change d'aide ménagère, ou non, après tout, pourquoi s'embêter ?" Et le grand classique : "Je vais à cet enterrement, ou finalement, je n'y vais pas." Et moi, spectateur impuissant de cette danse absurde, je me dis que le vent de folie qui a pris ma mère ne semble pas prêt de se calmer sauf le jour de son propre enterrement où fatalement, elle devra bien se rendre !

Côté cœur, c'est du Marivaux en action. Elle papillonne, vole de fleur en fleur, tentant de séduire des oiseaux rares, aussi rares que les moments où je ne me prends pas la tête entre les mains en voyant venir le désastre. Ces oiseaux-là, croyez-moi, ils ne manqueront pas de plumer ma mère volage, qui, dans son infinie candeur, s'imagine en reine de la basse-cour.

Je rêve secrètement d'un vent salvateur qui l'emporterait, loin, très loin, où je ne serais plus obligé d'endurer ses caprices de mouche du coche. Mais hélas, tel un insecte obstiné, elle bourdonne autour de moi, infatigable, m'inoculant ses idées noires, ses réflexions en décomposition.

Ah, si seulement il existait un répulsif contre ce genre d'insupportable manège… Mais non, il ne me reste qu'à regarder ma girouette de mère tourner, tourner, jusqu'à ce que l'épuisement l'arrête, ou me terrasse.

Ah, j'avais presque oublié de mentionner cet autre détail succulent, digne d'une farce de Molière revisitée. Figurez-vous que ma mère, dans son grand art du changement d'avis compulsif, a réussi l'exploit de changer trois fois de notaire. Oui, trois fois ! À chaque nouveau notaire, elle semblait persuadée d'avoir trouvé l'élu, celui qui comprendrait ses caprices immobiliers mieux que personne. Hélas, à peine le pauvre homme s'était-il familiarisé avec ses lubies que, déjà, elle virevoltait vers un autre, telle une girouette affolée par un vent capricieux.

Mais ce n'est pas tout, non. Dans cette vaste comédie des errances administratives, elle est même parvenue à pousser à bout le juge de paix, cet homme stoïque qui, pourtant, en a vu d'autres. Le pauvre diable, chargé de veiller sur ses intérêts, a fini par se rendre à l'évidence : ma mère, c'est l'incarnation du chaos organisé. Et la voilà donc, désormais, sous administration judiciaire, une sorte de mise sous tutelle pour volatiles incontrôlables.

Bref, ma vie ressemble à une pièce de théâtre, sauf que je n'ai jamais demandé à en être l'acteur principal. Ah, Georges Chelon, si seulement tu savais…

Girouette !

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